Pogback. Le 7 août dernier, Manchester United a voulu marquer le coup en lançant fièrement ce hashtag annonçant officiellement le retour de Paul Pogba chez les Red Devils. Un transfert qui a mis du temps à se décanter après de longues négociations avec la Juventus Turin et une communication à coup de tweets et de clashs à l'encontre de la presse de la part de l'agent du joueur, Mino Raiola. À 23 ans, l'international tricolore est donc devenu le joueur le plus cher de la planète football. Les Mancuniens ont dépensé plus de 100 millions d'euros pour s'attacher les services du Français parti libre quelques années plus tôt. En plus d'un joueur talentueux, les pensionnaires d'Old Trafford ont aussi acheté une marque, une image. Les Anglais comptent en effet sur les ventes de maillots floqués au numéro 6 de Pogba pour faire rentrer de l'argent dans les caisses du club. Mais c'est aussi et surtout sur le terrain que le footballeur âgé de 23 ans est attendu au tournant, lui qui n'a jamais caché qu'il avait l'ambition de remporter un jour le fameux Ballon d'Or. Deux mois environ après son arrivée à Manchester United, la presse anglaise estime qu'il est temps de se questionner sur la rentabilité de Pogba en Premier League. Statistiques à l'appui, les médias britanniques dont The Independent se sont penchés sur son cas et ont constaté que le Frenchy n'avait pas l'impact espéré.

Une adaptation qui prend du temps

S'il a joué 8 rencontres toutes compétitions confondues cette saison, le footballeur né en 93 a été aligné à 6 reprises en championnat cette saison (540 minutes jouées). Six rencontres qu'il a toutes jouées en intégralité. Niveau stats, Paul Pogba n'a marqué qu'à une seule reprise. C'était face à Leicester (4-1). Pourtant, il a tenté sa chance avec 25 frappes. Seulement 5 ont été cadrées. Le Français n'a également délivré aucune passe décisive. Toujours au niveau des passes, la Pioche en a fait 512 en 6 rencontres et il affiche un taux de passes réussies de 83,8%. The Independent précise qu'il est le 43e à ce niveau-là parmi les milieux de terrain évoluant dans la ligue anglaise. Des chiffres qui mettent en évidence le fait que le Français n'est pas assez décisif, bien qu'il ose. Mais on peut aussi ajouter qu'avec les chiffres, on peut faire dire beaucoup de choses. Qu'en est-il vraiment sur le terrain ? Après une première réussie avec les Mancuniens, l'international tricolore a alterné le moins bon, s'attirant notamment les critiques de la presse britannique mais également d'anciens joueurs tels que Paul Scholes, et le bon, lors de ses deux derniers matches notamment face à Leicester et Stoke City.

Journaliste à SFR Sport et spécialiste du foot anglais, Salim Baungally nous en dit un peu plus sur l'adaptation de Paul Pogba à Manchester United : «Il y a eu trois phases. Il y a eu une première phase avec son arrivée à Manchester United. Ça avait plutôt bien démarré pour lui, on peut notamment penser à sa première rencontre lors du match face à Southampton. Une victoire 2 à 0. J'avais surtout vu un Pogba intéressant dans l'endurance. On se demandait s'il allait tenir 90 minutes après un été particulier. Au final, il avait plutôt bien tenu. On avait été agréablement surpris. Donc en partant de cette base assez haute, on se disait qu'il ne pouvait que progresser. Mais c'est le problème. Comme il est parti de très haut, on voulait qu'il aille encore plus haut. Ça n'a pas été le cas immédiatement. Il y a eu une baisse de niveau et de performance de sa part. C'était sans doute logique car il devait digérer sa préparation à Manchester. On l'a vu en dedans, faire très peu de passes et surtout faire des frappes de loin désespérées. Puis, c'est tactiquement qu'on a senti les choses changer. Il allait beaucoup mieux sur les deux dernières rencontres face à Leicester et face à Stoke City. Il a joué un peu plus haut à cause de l'absence de Wayne Rooney et avec ça on a senti un Pogba bien meilleur».

Un nouveau système qui permet à Pogba de mieux s'exprimer

Ce système en 4-2-3-1 avec toutefois un Ander Herrera un peu plus bas que Pogba permet en effet au Français de se projeter plus vers l'avant tout en s'acquittant un peu moins du travail défensif. Pour Salim Baungally, cet ajustement du système convient mieux à Pogba et explique en partie son rendement qui était décevant jusqu'alors : «Au niveau des passes décisives, il n'en a pas fait. Mais concernant les passes clés, c'est-à-dire les passes entraînant des opportunités, ce week-end typiquement face à Stoke, il en a fait énormément en étant placé un peu plus haut. Il a été bon et même excellent par séquences. La relation entre lui et Zlatan Ibrahimovic a été très bonne. Tout ça, on le voit depuis deux matches, contre Leicester et Stoke. Il faudrait peut-être un petit peu patienter pour voir des passes décisives arriver. Mais ce système où Rooney est éjecté permet à Pogba d'être plus haut et d'être plus proche d'Ibrahimovic pour avoir ses opportunités. En plus des passes, il a frappé sur la barre. Il a manqué de réussite. Ce nouveau système mis en place par Mourinho va permettre à Pogba de marquer et de faire des passes décisives». Paul Pogba prend donc ses marques petit à petit au sein de cette équipe mancunienne.

En plus du système, The Independent ajoute également que la qualité des joueurs évoluant autour de Pogba au milieu peut aussi expliquer les faibles statistiques du joueur. Le média anglais les compare à ceux que côtoyait la Pioche en Italie, à l'image de Pirlo, Vidal ou Khedira. «Il y a deux choses. D'une part, la qualité intrinsèque des milieux de terrain défensifs. Les noms qui sont régulièrement cités à la Juve sont peut-être un cran au-dessus de ceux de Manchester United, commente Salim Baungally. Et puis, il est dans cette équipe de Manchester United depuis seulement la 2e journée. C'est très peu au final pour réussir à établir les connexions parfaites. Ça a mis du temps à les établir à la Juventus. Puis après on a l'impression que c'était parfait. Ça l'était car il y a eu le temps pour mettre ça en place. Il faut de la patience et que Mourinho stabilise clairement son milieu de terrain. Il y a toujours des questions autour de Fellaini, Carrick, Herrera. On a l'impression aujourd'hui que c'est Herrera qui occupe ce poste. Avec lui, Mourinho a trouvé la stabilité qu'il voulait et cela va permettre à Pogba d'établir les connexions plus rapidement avec Herrera, Mata». Du temps, voilà ce qu'il manque à Paul Pogba. Mais on est forcément beaucoup moins patient avec le joueur le plus cher du monde, une étiquette qui va coller longtemps à la peau et au maillot du Français...