Venise : le cas Wissam Ben Yedder enflamme déjà l’Italie
Embourbé dans des affaires juridiques, Wissam Ben Yedder n’a pas trouvé chaussure à son pied lors des deux derniers mercatos. Toutefois, il existe une ultime opportunité à Venise pour le Français, libre de tout contrat. Mais le temps presse pour WBY, dont le cas intrigue de l’autre côté des Alpes.

En pleine tourmente médiatique depuis les accusations d’agression sexuelle en état d’ivresse manifeste, refus d’obtempérer, conduite sous l’empire d’un état alcoolique et violences psychologiques, Wissam Ben Yedder n’a pas retrouvé de club depuis sa fin de contrat avec l’AS Monaco. Avec plusieurs affaires judiciaires sur le dos, l’international français, un temps annoncé du côté de Montpellier, s’est fait discret jusqu’au dernier mercato où son nom a été lié à Venise. Interrogé sur le sujet, le manager Eusebio Di Francesco a préféré botter en touche : «Il faut en parler avec le club. Ce n’est pas un joueur de Venise. Nous l’évaluons, mais ce n’est pas à moi de décider. Je ne choisis pas, je ne peux que donner un avis technique», a sobrement déclaré le coach italien. Mais les informations italiennes persistent et signent. Actuellement libre après la fin de son contrat avec Monaco, Wissam Ben Yedder est le profil sur lequel travaille Venise pour améliorer son attaque. Le joueur de 34 ans, qui a marqué 20 buts en 34 matchs entre la Ligue 1 et la Coupe de France la saison dernière, apporterait un leadership technique dans une ultime tentative de maintien dans l’élite italienne. Les dirigeants vénitiens procèdent encore à des évaluations internes selon les informations de Sky Italia, mais les chances de verrouiller l’arrivée de WBY augmentent. La décision est toutefois attendue prochainement et devrait arriver jeudi soir.
Un contexte extrasportif très compliqué
Les contacts durent depuis plusieurs semaines et dans les rues de la Sérénissime, on parle désormais de son arrivée comme de bien plus qu’un rêve. Et en Italie aussi, cette rumeur fait couler de l’encre :«on ne sait pas si ce dossier va aller au bout. Il y a des choses qui pourraient venir impacter l’adaptation du joueur parce qu’on sait que quand il y a des choses de ce genre-là, c’est sûr que les journaux vont en parler. Cela pourrait compliquer la tâche. Aujourd’hui, il n’y a pas d’opposition à son arrivée au moment où on parle. Mais on peut penser que les choses vont exploser dans les médias après sa signature. Dans le sens où, jusqu’à ce que ça ne se fasse pas, ça ne fera pas de bruit. Il y a un autre joueur qui est en Serie B et qui joue justement. Il est quand même inculpé d’agression sexuelle. Il y a quelque temps, il est sorti qu’avec un but tout semblait lavé… C’est tout de même toujours des sujets délicats», expose Valentina Clemente. Interrogé par nos soins, Antonio Parrotto, journaliste à Tutto Mercato Web, a mis en lumière l’hypocrisie ambiante en Italie : «de ce que j’ai compris en France ou dans d’autres pays, ils sont beaucoup plus sensibles à ce genre de choses qu’en Italie. Nous avons eu des politiciens qui ont eu des problèmes dans la vie privée tout en continuant à exercer leur pouvoir, nous avons eu des figures louches qui ont pris le commandement de clubs importants et non, et encore moins si l’Italie est scandalisée pour un footballeur avec des problèmes privés, même graves. L’Italie est un grand pays, il est beau, mais il est aussi riche en contradictions et il est très hypocrite. On peint le signe rouge contre la violence envers les femmes à l’occasion de la Journée internationale contre la violence envers les femmes en pensant que cela suffit pour se laver la conscience, mais ensuite fait jouer des footballeurs accusés de violences sexuelles».
Forcément, si les problèmes judiciaires de Ben Yedder sont arrivés jusqu’aux oreilles de certains tifosi et journalistes italiens. Un cas de conscience se pose donc : «l’affaire Ben Yedder n’est pas si célèbre en Italie, mais ici aussi, nous avons des joueurs problématiques (même avec des problèmes de paris sur leurs propres matchs). En Italie, nous sommes fans du commérage et du trash. Nous aimons commenter ce genre de choses et je suis sûr que si vous signez avec Venezia, il y aura des discussions sur la situation de Ben Yedder hors du terrain», a déclaré Alessandro Vescini qui travaille pour Tutto Venezia Sport et DAZN Italia. Si le football italien a déjà été entaché par plusieurs scandales liés au dopage, au racisme dans les tribunes ou à la corruption des arbitres, les instances essayent de plus en plus d’offrir une belle publicité à l’international : «non, je ne suis pas surpris, nous sommes toujours en Italie! Il suffit de jeter un coup d’œil à nos politiciens, donc je ne suis pas choqué de voir arriver en Italie un joueur avec derrière lui une affaire juridique aussi importante. Les dirigeants de la Venise auront fait les évaluations du cas et évidemment le besoin désespéré d’un attaquant après la cession de leur attaquant principal Pohjanpalo a prévalu sur d’autres aspects, Même les éthiques, mais je peux dire que vu tout ce qui se passe en Italie je ne suis absolument pas surpris de l’arrivée de Ben Yedder dans notre football», a détaille Antonio Parrotto.
C’est donc en toute logique que la rumeur Wissam Ben Yedder à Venise a rapidement été sur toutes les bouches : «le nom de Ben Yedder a certainement laissé un peu perplexe, étant donné les problèmes juridiques. Quand il y a des problèmes juridiques, ça fait du bruit. Un cas similaire a été celui de Manolo Portanova, actuellement à Reggiana, on en a beaucoup parlé. Donc, on parlerait certainement beaucoup de Ben Yedder. Au niveau de l’image, il y aura assurément un peu de répercussions vu le poids des accusations, plus d’une personne en dehors de Venise s’est déjà exprimée négativement sur l’éventuelle arrivée de Ben Yedder», nous a confié Davide Marchiol de Tutto Venezia Sport.
Un impact sportif évident
Si rien n’est encore officiel, il est évident que la transaction est en très bonne voie. La présence de Wissam Ben Yedder dans les travées du stade Pier-Luigi-Penzo n’est pas passée inaperçue : «il a été aperçu lors du match contre la Roma. C’est peut-être en bonne voie. C’est clair que, soit l’entraîneur Eusebio Di Francesco, soit la direction du club, est en train d’étudier la possibilité de cette arrivée. Le joueur ne joue pas à cause de ses soucis judiciaires. Avant tout, il y a l’aspect technique par rapport au fait qu’il n’a pas de minutes dans les jambes, ils ont besoin de prendre quelqu’un qui puisse faire la différence», a précisé Valentina Clemente. Le choix peut paraître cornélien pour la direction de Venise car l’opportunité de marché est historique pour ce petit club d’Italie. La vente du buteur finlandais Joel Pohjanpalo à Palerme a laissé le poste d’attaquant titulaire vacant. L’arrivée de Ben Yedder coche donc plusieurs cases pour aider l’équipe : «Son impact peut être positif. C’est un joueur très talentueux qui peut faire du bien à Venise. Cela dépend du mental avec lequel il arrivera en Serie A», a ajouté Alessandro Vescini, alors que Davide Marchiol a poursuivi : «au niveau technique, nous parlons d’un garçon très fort, même s’il est resté longtemps inactif, donc de ce point de vue, cela ne serait que d’aide».
Mais il est aussi important de différencier les réseaux sociaux, dont le pouvoir de résonance est parfois loin d’être aussi important que les presses traditionnelles : «je pense qu’il est un très bon joueur, mais je ne sais pas s’il est suffisant pour sauver Venise. Il est hors de forme. Sa situation extra sportive, c’est très sérieux et logiquement, il n’y a personne qui ne le veut pas ici. Mais c’est une situation dont on parle plus sur les réseaux sociaux que sur les médias mainstream pour le moment», souligne Michele Tossani de Tuttosport et Corriere delle Sera. Malgré le recrutement de Daniel Fila (22 ans), l’effectif reste très jeune. L’expérience de Ben Yedder dans cette équipe n’est pas négligeable : «je ne suis pas surpris. Le sentiment est que Venise est encore faible en attaque, malgré le marché de janvier. Fila est un jeune homme intéressant, mais il manque d’expérience, donc Venezia a pensé aux joueurs libres. Il faut dire qu’apparemment une décision définitive ne sera prise que demain, précisément parce que même dans la direction entre les problèmes physiques et juridiques, il y a un doute inconcevable», a également détaillé Davide Marchiol.
Le mot de la fin sera pour Antonio Parrotto : «comment vous dites en France ? Oh, les italiens ! (rires, ndlr). Bien sûr tout le monde ne ferme pas les yeux, certains protestent, mais ils sont nettement minoritaires. Sur les réseaux sociaux, il y a des fans qui ont critiqué la décision de Venise, mais il y a aussi ceux qui disent qu’il ne faut pas penser à ces choses, que la loi pense à cela. En Italie, les dirigeants de football sont engagés dans la lutte contre le piratage parce qu’ils perdent beaucoup d’argent de cette activité illégale, mais une fois, au lieu de penser seulement à l’argent divin, ils pourraient faire équipe, ne pas penser seulement à l’apparence et se souvenir de la violence contre les femmes le 25 novembre, Journée internationale contre la violence envers les femmes, mais aussi penser concrètement à quelque chose de plus grave et plus sérieux qui ne concerne que leurs intérêts». Actuellement 19ème de Serie A, Venise pourrait connaître un tournant dans sa saison si les négociations entre toutes les parties trouvaient une issue positive. En cas de signature de Ben Yedder, une atmosphère particulière pourrait aussi entourer la fin de saison du club.
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