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Jonathan Clauss : « certains moments où j’avais envie de péter les plombs, d’autres où j’étais super heureux »

Par Constant Wicherek
19 min.
Jonathan Clauss lors du stage de l'OM à Marbella, en Espagne @Maxppp

Jeudi dernier, après une matinée d’entraînement pluvieuse à Marbella, rendez-vous était pris avec Jonathan Clauss à l’hôtel Don Pepe Gran Melia, réservé par l’OM pour ce stage. Le latéral droit phocéen est revenu, pour Foot Mercato, sur sa première partie de saison, sur son coup de moins bien, ses vacances, sa relation avec Igor Tudor et sur son "deuxième père", Franck Haise.

Foot Mercato : comment jugez-vous le début de saison de l’OM ?

Jonathan Clauss : le bilan est plus positif que négatif. Même s’il y a eu des déconvenues, beaucoup de choses ont changé. Il y a beaucoup de nouveaux joueurs, un nouveau coach, un nouveau staff et un nouveau style de jeu. Quand on regarde le classement, même s’il y a eu la Ligue des Champions, qui est une parenthèse pas si négative, on n’est pas si loin. On a fait honneur au maillot, c’était important. Il reste des choses à peaufiner. On a eu le temps de voir tous ensemble comment le coach voulait jouer. Chacun peut apporter sa pièce à l’édifice pour que ce soit plus propre, plus imposant et plus efficace. Dans l’ensemble c’est positif.

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FM : vous avez une carrière particulière (il est arrivé dans le monde professionnel tardivement, ndlr), qu’est-ce que ça procure comme sensation d’être la priorité de l’OM ?

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JC : j’ai repensé à tout cela il y a quelques jours. Dans ma carrière, je n’avais jamais été acheté, j’étais toujours parti libre. Forcément quand les discussions commencent, mon agent m’explique que je ne suis pas libre, que les négociations prennent du temps. Pour moi, c’était tout nouveau ! Cela se discute d’agent à agent, de club à club, nous sommes là aussi. On n’a pas vraiment notre mot à dire à part si on veut rejoindre un club ou non. Après, les décisions ne nous appartiennent plus. Nous sommes toujours à la recherche d’informations et mon agent m’a dit "ne me rends pas fou, parce que tu vas te rendre fou. Ne t’inquiètes pas je gère et quand j’ai des informations, je te les communique". C’est dingue.

FM : comment vivez-vous le fait d’avoir fait l’objet d’un transfert pour la première fois ?

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JC : honnêtement, je ne sais pas (rires) ! Je me posais parfois la question, puis finalement, c’est comme ça. Il n’y a pas plus de responsabilités parce qu’à chaque fois que j’ai rejoint un club, je me disais qu’il fallait que je prouve. Mais aujourd’hui, le niveau est tellement exigeant que je me rends compte que c’est plus qu’un métier. Avant, c’était un métier et aussi une passion, aujourd’hui, je pense que je suis passé au-dessus. Je ne me dis pas que je suis redevable au club, mais presque. Je vais devoir faire encore plus que ce que j’avais déjà fait alors que j’avais l’impression déjà d’avoir tout donné dans les clubs où je suis passé.

« Physiquement, le corps s’adapte. Mais la tête, c’est plus difficile. Il faut trouver des solutions »

FM : est-ce que vous avez découvert d’autres choses en vous ?

JC : en réalité, c’est de l’apprentissage. Dans cette première partie de saison, cela a été très rapide. On jouait tous les trois jours, on ne pouvait pas vraiment travailler les bases parce qu’il fallait jouer, récupérer puis jouer à nouveau. C’est de l’apprentissage psychologique, mental, se remettre en question plus rapidement. Tout est accéléré et parfois nous avons l’impression de ne plus progresser. C’est parce qu’on ne sait plus où donner de la tête. Est-ce qu’il faut se concentrer sur les matches ? Se concentrer sur les entraînements ? J’avais l’impression de devoir me concentrer sur tellement de choses que je me suis dit à un moment qu’il fallait que je laisse couler, que je fasse ce qu’on me demandait et que j’aurais le temps d’emmagasiner ce qu’on me demande quand ce sera plus calme.

FM : vous arrivez à prendre ce recul ?

JC : il le faut ! C’est dur. Il y a des moments parfois de nervosité. Certains moments où j’avais envie de péter les plombs, parfois j’étais super heureux. Tout est disproportionné et le temps est raccourci. Je passais du lundi où j’étais hyper content, au mardi où j’étais au fond du gouffre. C’est dingue à vivre. Ce n’est pas évidemment. Pour moi, ça va encore puisque je sais comment je fonctionne, mais c’est difficile pour l’entourage. Quand je rentrais, ma copine me demandait comment si ça allait et je répondais "non". Et parfois, après un entraînement : "oh, je suis trop content". C’était les montagnes russes.

FM : c’est aussi comme ça que vous expliquez votre petite baisse de régime ?

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JC : je pense que c’est un tout. La surcharge que je n’avais pas connue avant. La surcharge émotionnelle est importante et je pense qu’on n’en parle pas assez. La souffrance physique, je la connais, ça ne me dérange pas de souffrir physiquement. J’ai appris à aimer courir, j’ai appris à aimer défendre. J’ai tout appris. Mais souffrir psychologiquement… Avant je jouais une fois par semaine, donc j’avais le temps de lisser cela. Là, tu souffres le dimanche soir et le lundi tu dois être calme. C’est peut-être cela. Je n’arrivais plus à redescendre assez bas le curseur de nervosité. Il remontait tellement vite ensuite. Je n’avais pas une overdose de nervosité, mais j’étais toujours sur le fil. Le Vélodrome, ça va dans les deux sens. Cela galvanise aussi. On joue pour ces gens-là. Quand le Vélodrome est plein à craquer et qu’on perd, on a l’impression d’être au milieu d’une arène. C’est dur à encaisser parce qu’on a envie de leur rendre tout ce qu’ils nous donnent. Tout est remis en cause, c’est cela qui est dur à gérer quand on n’a pas l’habitude de jouer aussi rapidement. Physiquement, le corps s’adapte. Mais la tête, c’est plus difficile. Il faut trouver des solutions.

FM : de quels genres ?

JC : par exemple, j’ai repris le yoga. Je ne fais pas de cours. Je me suis fait une salle de sport à la maison, quelque chose de calme pour me poser. Il faut tenir une rigueur sur cela. Si maintenant, je le fais une ou deux fois par semaine, ça va parce que j’ai le temps. Mais les semaines où on n’a pas le temps, il faut trouver ce temps-là pour se vider la tête et remettre les idées en place. C’est cela qui est important. Quand on a des spirales qui sont comme des montagnes russes comme nos résultats ont pu l’être à un moment donné, c’est dur.

FM : à part la dimension émotionnelle, qu’est-ce qui vous a le plus impressionné depuis que vous êtes à l’OM ?

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JC : le Vélodrome. Je savais dans quoi je m’embarquais footballistiquement. Je connaissais le projet du club, qu’il y aurait la Ligue des Champions et que tout cela était un cran au-dessus, mais le Vélodrome. Je compare souvent Bollaert et le Vélodrome, j’adore ces deux ambiances, mais c’est comme tout, comme le niveau, à Bollaert on avait 35 000 personnes qui nous poussaient, là c’est le double. C’est pareil pour nous les joueurs, c’est deux fois plus de tout.

FM : comment avez-vous vécu votre première participation à la Ligue des Champions ?

JC : l’arrivée à Tottenham, c’était déjà fou. J’ai trouvé le stade extraordinaire. Pas franchement l’ambiance qui est une ambiance… disons.. anglaise, mais la structure du stade est magnifique. On ressent une autre dimension quand on met le maillot avec l’écusson de la Ligue des Champions. Les tapis à l’entrée des joueurs, c’est la C1. Tout ce qu’on voyait à la télévision, on le vit. Il y a aussi la musique. Je l’ai toujours dit : il y a deux ou trois musiques que je voulais entendre en étant acteur, c’était la Marseillaise et l’hymne de la Ligue des Champions. Si je devais arrêter aujourd’hui, j’aurais rempli le contrat avec ces deux belles musiques. C’est au-dessus de beaucoup de choses. 

FM : qu’est-ce que représente le niveau Ligue des Champions ?

JC : c’est beaucoup plus exigeant. Ce n’est pas spécialement plus rapide ou plus physique. Évidemment que c’est un niveau au-dessus, mais il est largement atteignable. Le plus dur c’est l’efficacité, à tous niveaux. Dans les prises de balle, devant le but, le rapport défensif. Une petite erreur, ça coûte. En Ligue 1 ou dans les championnats que j’ai connus, une petite erreur, ça se rattrape. Dans ces matches-là, ça ne se rattrape pas.

FM : c’est ce qui a manqué à l’OM ?

JC : il y a de la découverte pour tout le monde. Je pense que l’efficacité offensive ou défensive nous manqué. La lucidité d’être efficace au bon endroit, au bon moment aussi. Tout cela ne se joue à rien. La tête de Kola par exemple. C’est une action parmi tant d’autres. Si en championnat, on gagne 3-0, qu’il rate cette tête-là, personne n’en parle. Celle à Monaco, c’est l’exemple parfait. Un degré d’efficacité, de lucidité. C’est 1%. Mais c’est ce pour cent qui fait que certaines grandes équipes restent de très grandes équipes. Quand je regarde la campagne du Real Madrid, ils sont d’une efficacité extraordinaire. Ils sont menés, ils ne sont pas dans de bonnes dispositions, ils ne stressent pas. Nous, nous sommes menés, on ne gère pas aussi bien. Mais, c’est normal. Ils sont habitués à cela, ils se disent qu’il reste du temps, nous on est plus agacés, plus nerveux, plus stressés, c’est cela qui pèse dans la balance. C’est cette petite chose qui nous a manqué, mais je nous ai trouvés, dans l’ensemble, très cohérents.

« Cela m’a fait du bien me sortir la tête du foot, voir autre chose, ne pas du tout en parler »

FM : il vient d’y avoir une longue coupure, qu’avez-vous fait ?

JC : je suis parti en Laponie ! J’ai fait du padel aussi. On a fait une semaine dans nos familles, on s’est reposé. J’ai pu voir des amis, la famille. Ensuite nous avons fait six jours en Laponie. Au départ, on hésitait entre l’Égypte et la Laponie. Cela faisait trop longtemps que je n’étais pas allé à la neige, dans le froid. J’adore le froid. Je partais à la montagne l’hiver avec ma famille et là je me suis dit que c’était le moment.

FM : c’était comment alors ?

JC : c’était dingue. C’était froid, mais ce n’est pas humide. Il fait moins 10 ou moins 15, mais on le ressent pas, car il n’y a pas de vent. Les gens sont adorables, les activités sont incroyables. Ce sont des choses qu’on ne connaît pas ici. En fait, découvrir totalement autre chose, c’est extraordinaire.

FM : cela vous a-t-il permis de vous vider la tête ?

JC : il fallait. Revenir en famille m’a fait beaucoup de bien. Comme me sortir la tête du foot, voir autre chose, ne pas du tout en parler, de vivre ma petite vie tranquille avec ma copine dans un endroit où personne ne me voit, ça m’a fait beaucoup de bien.

FM : vous avez l’air d’être quelqu’un de plutôt casanier pourtant…

JC : c’est ça ! Quand j’étais jeune, j’adorais être entouré. Plus je grandis, plus j’apprécie être seul chez moi. C’est moi qui décide ce dont j’ai envie de faire. C’est ma copine qui m’a apporté ce goût du voyage. Avant elle, quand j’avais un mois de vacances, je partais un mois en famille. Elle aime trop ça et moi je suis d’accord (rires).

FM : quels pays avez-vous découverts ?

JC : nous sommes allés en Floride la première année où nous nous sommes rencontrés. Nous avons été en Tanzanie puis des petits week-ends à Londres ou Rome. Elle aime bien voyager. Moi, quand on m’organise tout, je suis ok (rires). Ma copine s’est lancée là-dedans, elle organise très bien les choses. C’est tellement bien fait que je suis (rires). Je sais que ça va être bien !

« Quand je suis arrivé, on me vannait beaucoup. Je n’arrivais pas à répondre parce que je ne savais pas trop si j’avais le droit d’attaquer ou pas »

FM : comment se passe ce stage ?

JC : à part le soleil qui manque, qu’on cherche encore (rires), cela se passe bien. Physiquement c’est dur, le staff ne nous lâche pas d’une semelle. C’est terrible, ils ne nous font aucun cadeau (rires). Le coach est très lucide aussi parce qu’il sait qu’on a besoin de nos moments. Le stage, ce n’est pas que fait pour qu’on soit chacun dans notre chambre. Mais quand c’est entraînement, c’est entraînement. Il y a des jours un peu plus calmes, mais quand il a décidé de nous arracher, il nous arrache. Dans le fonctionnement, je pense qu’il a raison, nous ne sommes pas là pour être en vacances. Il est fidèle à lui-même.

FM : on a pu voir aussi qu’il y avait beaucoup d’intensité sur les oppositions

JC : oui, mais cela va vite. Quand les séances sont longues, qu’il y a de la fatigue parfois on n’accepte pas de ne pas récupérer le ballon alors on accroche un peu. Parfois, il y a des duels et il y a de l’ego qui rentre en jeu, c’est naturel. Issa (Kaboré) et Nuno (Tavres), c’était un combat de MMA (rires). Les deux dans le grillage, on leur a dit qu’on avait plus qu’à leur rajouter une cage. C’est aussi ça. Cela pousse les deux a être plus forts et plus concentrés. C’est comme ça tous les temps. 

FM : vous avez aussi croisé vos anciens partenaires de Lens

JC : oui, je les ai croisés, mais ils s’entraînent plus tôt que nous. Je n’ai pas encore vu le coach par contre, je l’ai juste vu passer. On discutait de tout et de rien entre nous, on était content de se revoir. On a vécu de bons moments ensemble. C’est cool. Je leur ai dit qu’ils faisaient une bonne saison. Mais je suis encore en contact avec quasiment tout le monde là-bas. Quand ils gagnent, je leur envoie un message. Je ne suis pas envieux, donc s’ils font bien les choses, je les félicite. Le club le mérite et tout le monde le mérite. C’est extraordinaire.

FM : ça ne vous étonne pas de les voir à ce niveau-là ?

JC : pas du tout ! C’est bien structuré. Le coach, je l’apprécie en tant que coach et en tant que personne. C’est quelqu’un qui nous ressemble. Il est arrivé un peu tard, il a connu la CFA, il a pris l’équipe en route, il a innové. C’est tout à son honneur ce qu’il est en train de réaliser. C’est fort.

FM : quelle est la plus grosse différence entre le vestiaire de Lens et celui de l’OM ?

JC : je pense que c’est les statuts. On sent qu’ici, on est monté d’un cran à ce sujet. Sans dénigrer Lens, il y a ici un Alexis Sanchez, un Dimitri Payet, un Mattéo Guendouzi. Ce sont des joueurs qui ont connu le très grand. C’est un vestiaire plus lourd en termes de palmarès, d’expérience. C’est la différence. On reste des hommes, c’est un groupe qui s’amuse ensemble. Si on ne fait pas cela, les saisons sont longues. On rigole toujours autant, les ambiances sont les mêmes. Quand je suis arrivé pour la première fois, je me suis dit que ce n’était pas le même vestiaire. Après, on apprend à découvrir les gens et on se rend compte que le palmarès ou l’expérience ne font pas la personne. Ce sont des a priori que j’avais au début. Je me suis demandé comment arriver dans un vestiaire comme celui-ci, moi qui ne me prends pas pour quelqu’un d’autre. Je ne me suis pas dit que j’étais quelqu’un avec des sélections en équipe de France, il faut me respecter. Je me suis dit que c’était à moi de m’adapter. Ensuite, si je peux amener ma touche, je le fais. C’est ce qui se passe en ce moment.

FM : vous faîtes beaucoup de blagues ?

JC : c’est ce qu’il faut ! Quand je suis arrivé, on me vannait beaucoup. Je n’arrivais pas à répondre parce que je ne savais pas trop si j’avais le droit d’attaquer ou pas. Il y a cette distance au début, mais maintenant c’est terminé (rires).

FM : sur quoi on vous vannait ?

JC : sur mes cheveux ! Il m’en manque un peu !

FM : quel est le premier joueur qui vous a vraiment mis à l’aise ?

JC : très honnêtement, tout le monde. La chance que j’avais c’est que j’avais déjà croisé Mattéo (Guendouzi) en équipe de France. Forcément quand je suis arrivé, il a été le premier à me parler. Il m’a même mis à côté de lui dans le vestiaire. Cela m’a étonné que tout le monde me parle lorsque je suis entré dans le vestiaire. Il n’y avait pas de méfiance. Que ce soit Dim (Payet), Val (Rongier), je me suis dit que c’était une famille. La phrase qui m’a marquée, c’est celle de Val (Rongier) : si on te vanne, c’est qu’on t’aime bien. A priori, ils m’aiment bien. Ils m’aiment même beaucoup (rires) !

« Le coach, un père super strict avec ses enfants »

FM : le coach aussi fait quelques blagues, aussi…

JC : oui, il est taquin. Pas toujours dans le mauvais sens ! Lors de l’entraînement, il peut te piquer pour te pousser, il aime bien cela. Mais il a aussi un autre côté. Il fait parfois deux ou trois petites blagues pour détendre l’atmosphère. C’est un père super strict avec ses enfants parce qu’il veut le meilleur d’eux-mêmes, mais au-delà de ça, en sortant du contexte football, c’est quelqu’un de très gentil, de très diplomate. Il a beaucoup de leçons de vie à nous donner sur les choses qu’il a vécues et que nous n’avons pas forcément vécues. Parfois il nous fait des petites remarques de dix ou quinze minutes sur la vie, de comment les choses se passent. Il parle de côté presque psychologique. Il parle de la vie, de penser autrement, de voir plus large. Il ne veut pas qu’on soit pas borné, mais qu’on voit large et loin.

FM : en tant que défenseur, qu’est-ce que cela vous fait d’être entraîné par un ancien grand défenseur ?

JC : là où il veut me faire progresser, c’est dans le un contre un pur. J’ai toujours été plus petit que les autres, plus frêle aussi donc le un contre un pur, dans le duel, je ne suis pas celui qui va le chercher. Je suis plutôt dans la lecture de jeu et l’anticipation. Après, quand il faut y aller, il faut y aller. Je suis souvent dans ce que je sais faire, lui il aime quand ça rentre dedans. Parfois nous ne sommes pas d’accord. Ce n’est pas un conflit, mais c’est la jauge qui bouge entre mon avis et le sien. Et c’est très formateur. Tudor Clauss

FM : on voit aussi souvent qu’il donne de la voix au piston qui est de son côté…

JC : le moment où je l’ai vraiment remarqué, c’était contre le Sporting, parce que c’était à huis clos. Je ne vais pas dire de trucs fous, mais à un moment donné j’avais l’oreille droite pleine (rires). Il faut faire abstraction de la forme. Il donne des conseils, il vous pousse tout le temps. Il cherche le 1% qu’il manque si vous vous donnez à 99%. Donc il va pousser jusqu’à ce qu’on atteigne ce 100, voire 101, 102 ou 103. Mais, nous, on a une autre vision. Si on vient de faire trois allers-retours et qu’au quatrième on a du mal à démarrer… Lui, il s’en fout. Mais, c’est là où il va me faire progresser. Parfois, j’ai ce moment-là, mais comme plein d’autres joueurs j’imagine, où je me dis "laisse-moi dix secondes". Mais non, il n’y a pas dix secondes. "Tu te reposeras à la mi-temps ou à la fin du match, dans la semaine, tu dormiras chez toi. Sur le terrain, c’est moi qui décide et si je veux que tu fasses douze fois l’aller-retour sans broncher, tu le fais".

FM : c’est justement le fameux pour cent Ligue des Champions ?

JC : c’est ce pour cent là oui. C’est le pour cent d’exigence, de lucidité, de coffre, de niveau.

FM : est-ce que c’est cela qui vous permet aussi d’être plus fort en Ligue 1 ?

JC : bien sûr. C’est pour ça que je dis que l’apprentissage a été vite pour tout le monde. C’est dur de tout emmagasiner. Évidemment qu’on intègre les choses, mais peut-être pas assez encore. Lui, il tire sur la corde pour qu’on avance vite et loin. Après c’est comment chacun intègre les choses. Le coach, il nous tire dix pour cent, on aura intégré que 5. C’est ça la différence. Un coach qui a joué à la Juve, il a vu tellement de choses passer, il sait qu’il peut tirer et que même si on râle, on va le faire.

FM : comment voyez-vous cette seconde partie de saison ?

JC : honnêtement, quand je vois qu’on a enchaîné tous les trois jours, que ça a été difficile et qu’on est seulement à six points de Lens…Je me dis que si on a ce brin de lucidité, de récupération en plus, on y sera. On sera très très bien même.

« Je retrouvais mon père dans Franck Haise »

FM : même si c’est un peu tôt pour en parler, vous vous voyez terminer à Marseille ?

JC : oui, sinon je ne serais pas venu. Je ne suis pas là en me disant que si ça ne se passe pas bien, au pire je vois autre chose. Justement, maintenant que je suis là, au très haut niveau, j’aime le très haut niveau et si l’OM me permet de jouer au très haut niveau, je vais rester.

FM : quelle était votre relation avec l’OM avant d’y signer ?

JC : j’étais fan de Strasbourg parce que je venais de là et que c’était mon rêve d’enfant. Au-delà de ça, il n’y a pas d’équipe dont je suis fan. J’ai pris cela comme un challenge à la base et aujourd’hui, je commence à comprendre que j’aime plus que ça le challenge.

FM : vous aimez aussi la région ?

JC : je n’habite pas dans la ville en elle-même. Mais la région est extraordinaire. Vivre au soleil, dans le sud, dans une ville qui respire le foot, c’est cela qui m’intéresse. 

FM : est-ce que parfois vous vous demandez où vous seriez si Floent Ghisolfi (ex-directeur sportif de Lens, aujourd’hui à Nice) n’avait pas été sur votre chemin ?

JC : je me suis déjà posé la question. Mais s’il n’avait pas été là… je ne sais pas ! Je serais sans doute resté à Bielefeld en Bundesliga. J’ai eu un super feeling en plus. Je crois beaucoup en Dieu, donc je me suis dit qu’il y a eu quelques coups de pouce qui font que je me suis retrouvé à Lens. Il y a eu Florent, mais aussi Alexandre Pasquini, l’analyste vidéo du RCL, que j’ai connu à Quevilly. C’est lui au départ qui prenait de mes nouvelles. C’est lui qui parlait de moi avec le directeur sportif. Je lui ai alors dit qu’il fallait m’appeler (rires). Entre lui, Florent Ghisolfi et Franck Haise, j’ai franchement eu trois bons coups de téléphone.

FM : on a le sentiment que vous avez une relation très particulière avec Franck Haise

JC : j’ai eu des coaches qui m’ont fait confiance. Lui, c’était plus que cela. Il me parlait de l’équipe de France au bout de six mois alors que je n’avais jamais joué en Ligue 1. Au-delà de ça, après le premier coup de fil qu’on a eu ensemble, pour moi, c’était évident. Je savais que j’allais venir, que Lens soit en Ligue 1 ou non. J’ai eu un feeling avec lui… Sans dénigrer mon père, parce que c’est mon père (rires), j’ai trouvé un deuxième père de famille. Dans sa façon de me diriger, c’était dingue. Je ne sais pas si c’était qu’avec moi, mais je l’ai ressenti comme ça. C’était hallucinant. Je retrouvais mon père dans Franck Haise.

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