Premier League : les raisons qui ont fait de Leicester le dauphin surprise de Liverpool

Par Aurélien Macedo - Constant Wicherek
9 min.
Leicester City FC @Maxppp

Leader de Premier League, Liverpool semble enfin se diriger vers un titre qui refuse de lui tendre les bras depuis la saison 1989-1990. Pour continuer leur parcours vers ce trophée, les Reds iront défier leur dauphin Leicester. Auteurs d'une saison impressionnante, les Foxes ont fait déjouer tous les pronostics. Pour autant, ce succès du club des Midlands de l'Est ne tient pas tellement du sensationnel. Explications.

On attendait Tottenham, Manchester United ou encore Arsenal, mais c'est finalement Leicester qui est - à nouveau - l'équipe surprise de cette première partie de saison en Angleterre. Second du championnat anglais avec dix points de retard sur le leader incontesté, Liverpool, les Foxes comptent un point d'avance sur leur premier poursuivant, Manchester City. Cette année, le club champion d'Angleterre en 2016, c'est douze rencontres remportées, trois nuls et seulement trois défaites. Mais leur classement s'explique tout autant par leurs qualités, que nous allons détailler, que par la méforme des gros de la ligue.

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Pour commencer, Tottenham, dernier finaliste de la Ligue des Champions, a connu un début de saison compliqué et, de fait, l'entraîneur en place, Mauricio Pochettino, a été remercié pour faire place nette à José Mourinho et, depuis, cela va mieux pour les Spurs, qui remontent doucement. Bon, Arsenal n'est clairement plus un membre du top quatre anglais depuis un moment et, là-bas aussi Unai Emery est parti pour laisser l'intérim à Freddie Ljungberg avant la nomination de Mikel Arteta. Chelsea a récupéré Frank Lampard et ne pouvait pas recruter. Cela a laissé place aux jeunes du cru comme Tammy Abraham et Mason Mount, mais les rencontres ont parfois été compliquées. Enfin, le tenant du titre, Manchester City compte déjà autant de défaites que lors de toute la saison dernière. Leicester étant régulier cette année, cette première explication tient la route. D'autant que c'est la meilleure défense d'Angleterre avec Liverpool (14 buts encaissés).

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Une défense exceptionnelle

Par rapport à l'année dernière, Leicester connaît un seul changement au sein de sa défense : Çağlar Söyüncü. Suite au départ d'Harry Maguire pour Manchester United, le Turc s'est imposé assez facilement comme nous vous l'avons expliqué le mois dernier et forme une charnière solide avec Jonny Evans. «Jonny Evans (qui n'a coûté que 4M€ ndlr) est décrit comme le "vol du siècle" par Brendan Rodgers, et il est facile de comprendre pourquoi. Ce n'est pas un hasard si Maguire et Söyüncü se soient épanouis aux côtés du Nord-Irlandais» nous explique Jamie Kemble journaliste pour le Leicester Mercury.

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«Ils travaillent tous les deux très bien ensemble, car Evans est le chef le plus expérimenté, qui guide Soyuncu dans son développement. Le défenseur turc se développe rapidement grâce à cela» ajoute de son côté Owynn Palmer-Atkin journaliste pour la BBC. À ces deux joueurs s'ajoutent Ricardo Pereira et Ben Chilwell. Considéré comme deux des meilleurs latéraux du championnat, ils se distinguent bien entendu sur le plan défensif, mais aussi sur le plan offensif puisqu'ils apportent beaucoup dans leurs couloirs. Une activité dont Leicester ne semble pas pâtir face aux attaques adverses. «Je pense que cela dépend uniquement du système. Ricardo est l'un des meilleurs arrières droits au monde, alors il va de l'avant en prenant ses responsabilités, sachant qu'il peut généralement revenir [...] En fin de compte, Leicester City attaque avec tellement de pression qu'ils sont rarement pris en contre-attaque» note Jamie Kemble.

Pour Owynn Palmer-Atkin en revanche, un homme permet à Ricardo Pereira et Ben Chilwell d'être assez libres lors de leurs montées : «deux mots. Un homme. Wilfred Ndidi. Lorsque Chilwell et Ricardo bombardent sur les ailes et aident Leicester dans leurs efforts offensifs, il serait facile pour les équipes de les frapper en contre-attaque. Mais, lorsque cela se produit, vous verrez souvent Evans et Söyüncü se séparer et se déplacer un peu plus loin, et Ndidi redescendre pour former une charnière à trois. C'est très simple, mais très intelligent de Brendan Rodgers.» Rouage de Leicester depuis son arrivée au club à l'hiver 2017, le milieu de terrain nigérian s'est affirmé comme l'un des meilleurs à son poste en Premier League. Il se distingue notamment par un gros volume et se montre déterminant en tant que travailleur de l'ombre.

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Les patrons du milieu

En progression constante depuis son arrivée, il est en train de montrer sa version la plus évoluée en cette saison 2019-2020. Meilleur dans son positionnement et dans son jeu de passe, il a surtout progressé dans ses prises de décision. D'un style assez stéréotypé où il récupérait et frappait de long, il se retrouve désormais organisateur et investigateur du jeu. Bien plus mature dans son football, il construit davantage autour de joueurs doués techniquement comme James Maddison et Youri Tielemans. «Il est incroyablement constant, à la fois en termes de performances et de forme physique, et beaucoup de ce que fait Leicester, repose sur ce que Ndidi fait au milieu de terrain. Il peut mettre des attaques sur le bon chemin ainsi que soutenir le milieu de terrain défensivement. Je ne pense pas que beaucoup de milieux défensifs de Premier League ont été aussi consistants que lui cette saison» souligne Jamie Kemble.

Si le parallèle avec N'Golo Kanté dans le style de jeu pourrait sembler évident, ce n'est pas tout à fait les mêmes joueurs pour Owynn Palmer-Atkin : «oui et non. Ils jouent tous les deux dans la même position et à l'œil nu font le même travail. Mais ce sont des acteurs très différents. Wilfred Ndidi est un destructeur. Un char, qui déplace tout ce qui se trouve devant lui et qui a un sens brillant du danger et balaie tout devant cette ligne arrière.» Un profil travailleur qui laisse le terrain dégagé aux artistes que sont Youri Tielemans et James Maddison. Arrivé de l'AS Monaco l'hiver dernier, le premier se charge de faire le liant et s'amuse dans son rôle. Le second s'adapte en tant que milieu de terrain même s'il est assez libre dans son placement. Évoluant l'an dernier en soutien de Jamie Vardy, James Maddison est moins présent à la finition, mais cela ne perturbe en rien Leicester.

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Davantage concentrer sur l'aspect créatif, le joueur arrivé à l'été 2018 de Norwich City a fortement évolué en un an et demi. Ses qualités techniques et son jeu de passe en font désormais le dépositaire du jeu des Foxes comme nous l'explique Owynn Palmer-Atkin : «James Maddison peut jouer n'importe où dans le milieu de terrain et joue toujours dans le rôle de milieu de terrain offensif devant Ndidi et Tielemans. Mais, il est capable de flotter et de ramasser la balle où il veut, ce qui lui permet de devenir le «quaterback» des Renards.Par exemple, lors de la victoire 4-1 à l'extérieur à Aston Villa - Maddison était en train d'aller dans la profondeur pour récupérer le ballon et briser les lignes afin de faire avancer les Foxes sur le terrain. Il dictait complètement le rythme et le style de jeu. C'est l'un des joueurs clés de Leicester et sans lui, le club ne serait pas deuxième du classement.»

Un Vardy super héros

Devant, nous avons retrouvé un grand Jamie Vardy. Lors de la saison du titre héroïque de Leicester en 2016, l'attaquant anglais avait inscrit 24 buts (0,7 but par match), donné 6 passes décisives, effectuait 2,6 passes clés par match et avait procuré à son équipe 10 occasions dangereuses. Même s'il continuait à marquer beaucoup, ses statistiques de buts par match étaient relativement inférieures (0.4 en 2017, 0,5 en 2018 et 2019). Cette saison, on le retrouve. Déjà 17 réalisations en Premier League et près d'un but marqué par match (0,9), il a en plus donné trois passes décisives et tire 2,4 fois par rencontre (2,6 lors de la saison du titre).

Il est donc probable que, s'il continue sur cette lancée et que Leicester continue à prendre peu de buts, les Foxes se retrouvent en Ligue des Champions la saison prochaine. Mais offensivement, il n'est pas le seul atout. Brendan Rodgers, l'ancien technicien de Liverpool, peut compter sur un retour de blessure de Kelechi Iheanacho. Et l'international nigérian fait beaucoup de bien. Sur les trois matches joués (deux titularisations) il a inscrit deux buts dont un super important dans le temps additionnel contre Everton, donnant la victoire aux Foxes. Ce retour en forme du Nigérian est important puisqu'il permet d'offrir des opportunités supplémentaires à Brendan Rodgers.

L'impact de Brendan Rodgers

Pour continuer à lutter pour la deuxième position et pour les places qualificatives en Ligue des Champions, Brendan Rodgers devra compter bien plus sur ses remplaçants.
«Rodgers a été très fidèle à son onze le plus fort pour la plupart, mais comme il l'admet, il est impossible que cela continue tout au long de la saison. Il devra s'appuyer sur d'autres joueurs, et vous l'avez vu avec Iheanacho récemment. Des joueurs comme Marc Albrighton, Wes Morgan et même Christian Fuchs auront un rôle à jouer, ainsi que d'autres» note Jamie Kemble. Pour Owynn Palmer-Atkin, le coach nord-irlandais est pour le moment dans le vrai dans son turn-over «il n'utilise peut-être pas souvent son banc, mais quand il le fait, il le fait correctement. Les Foxes ont eu les remplacements les plus influents en Premier League cette saison, et la plupart ont réussi à marquer, à faire des passes décisives ou à conserver un score. Il y a une pensée tactique constante dans l'esprit de Brendan Rodgers lorsqu'il fait des changements, et il ne fera pas des changements juste pour en faire.»

Arrivé du Celtic Glasgow le 26 février 2019, Brendan Rodgers fêtera dans deux mois sa première année sur le banc des Foxes. Depuis qu'il a pris la succession de Claude Puel, l'équipe n'a jamais cessé de progresser. Pour autant l'actuel coach de Saint-Étienne a posé les bases de ce succès selon Owynn Palmer-Atkin : «Claude Puel, malgré ce que certains pourraient dire, a fait un travail qui devait être fait au club de football. Une équipe de joueurs vieillissants avait besoin d'être inondée de sang jeune et il fallait que le style de football change. Il l'a fait, et sans ce travail, nous ne verrions pas la Leicester City que nous voyons maintenant.»

Pour autant, il estime que l'arrivée de Brendan Rodgers a permis d’accélérer la mutation des Foxes : «cependant, Brendan Rodgers l'a porté non seulement à un nouveau niveau, mais à plusieurs nouveaux niveaux. La première grande décision a été de passer de deux milieux de terrain défensifs à un seul, et d'introduire un schéma différent au niveau des trois milieux de terrain au centre du terrain. Mais plus que tout, Brendan Rodgers a permis à Jamie Vardy d'être utilisé beaucoup plus. Depuis que Brendan Rodgers est arrivé à Leicester City, aucun joueur en Europe n'a marqué plus de buts et le numéro 9 est actuellement en tête du classement des buts de la Premier League avec 17 buts déjà cette saison. Il obtient de meilleurs ballons, fait moins de course et semble plus confiant et menaçant que jamais.» Tous ces éléments expliquent l'excellent début de saison de Leicester et tout le monde espère revivre, sans le titre probablement, l'incroyable saison 2015-2016... Prochain test ce jeudi à 21h face à Liverpool (rencontre à suivre sur notre live commenté).

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