Comment le mercato de l’OL a tourné au fiasco !

Par Sebastien Denis
10 min.
Bruno Cheyrou, le patron du recrutement de l'OL @Maxppp

Rarement un mercato d’hiver n’a été aussi mouvementé dans un club de Ligue 1. À l’OL rien ne s’est vraiment passé comme prévu et le club rhodanien a plus perdu que gagné. Un homme ressort fortement affaibli de ce mercato chaotique, un certain Bruno Cheyrou.

1er juillet 2022. Quelques jours après avoir rapatrié Alexandre Lacazette, l’OL fait revenir Corentin Tolisso libre et annonce le nouveau prêt de Mateus Tetê, l’attaquant du Shakhtar Donetsk. L’ambiance est joviale et détendue et Bruno Cheyrou lâche une punchline qui est devenue aussi mythique que virale : « il y a peut-être des coachs dans d’autres clubs de Ligue 1 qui sont en train de vouloir partir parce qu’ils sont jaloux du recrutement qu’on est en train de faire… » Une pique à peine déguisée pour l’Olympique de Marseille qui a alors plus de mal à faire avancer son mercato, et qui voyait Sampaoli se diriger vers un départ.

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La suite on la connaît, avec un Peter Bosz viré, une préparation physique défaillante, un effectif totalement déséquilibré qui végète à la fin de la première moitié de la Ligue 1, et une arrivée de Laurent Blanc qui ne change pas grand-chose au marasme lyonnais. La trêve liée à la Coupe du Monde arrive, de quoi remettre l’OL à l’endroit et de faire une solide préparation physique tout en préparant le mercato d’hiver. Et les besoins lyonnais sont évidents et sont rapidement identifiés par Bruno Cheyrou et Laurent Blanc. L’objectif est de recruter trois joueurs expérimentés qui débarqueraient dès le début du mois de janvier pour apporter une véritable plus-value à un groupe qui en manque terriblement. Sont ciblés : un défenseur central, une sentinelle et aussi un latéral droit susceptible de suppléer, ou de remplacer en cas de départ, Malo Gusto, lui qui jouit d’une belle cote et qui a bénéficié de quelques approches concrètes pendant l’automne, notamment d’Angleterre.

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De la friture sur la ligne dès le début entre Cheyrou et Blanc

Mais dès le départ, Blanc et Cheyrou ne sont pas sur la même longueur d’onde, malgré un démenti de l’entraineur lyonnais. Ils arrivent tout de même à trouver un compromis et font revenir Dejan Lovren, solide défenseur croate passé par l’OL mais qui a évolué plusieurs saisons à Liverpool avant d’aller tenter sa chance en Russie. Premier objectif atteint donc pour l’OL qui accueille un profil expérimenté et qui connaît bien la maison. Le début des réjouissances donc pour les supporters de l’OL, qui rêvent alors de gros coups et de renforts capables de remettre l’OL à la place qui est la sienne, à savoir dans le top 5 de la Ligue 1. En parallèle, la direction lyonnaise doit aussi s’activer dans le sens des départs. Et là aussi les partants sont clairement identifiés par Bruno Cheyrou : Jeff Reine-Adélaïde, Romain Faivre et plusieurs joueurs en fin de contrat sur lesquels Laurent Blanc ne compte plus : Jérôme Boateng, Moussa Dembelé ou Damien Da Silva.

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Problème, aucun d’eux ne veut partir, et ce, pour diverses raisons. Le premier (JRA) a eu des garanties de la part de Laurent Blanc et rêve de s’imposer à l’OL. Le second (Faivre) n’est pas chaud pour partir un an après son arrivée. Quant au champion du monde 2014, il dispose d’un très confortable salaire et n’entend pas filer en Arabie Saoudite où il est courtisé. Enfin, les deux derniers n’ont pas vraiment d’intérêt à partir à six mois de la fin de leur contrat malgré quelques approches venant d’Angleterre pour Dembelé et de Nantes pour Da Silva. Les jours passent et aucun joueur n’arrive ou ne part. Les supporters patientent et sont plus focalisés sur le début du mois de janvier catastrophique de leur équipe (défaite à domicile sur le fil à domicile face à Clermont, nul à Nantes, nouvelle défaite à domicile face à Strasbourg).

João Gomes et rien d’autre…

Motif d’espoir le 17 janvier, la possible arrivée de João Gomes, milieu de terrain international U20, reconnu comme l’un des plus grands espoirs au milieu de terrain au Brésil. Mais l’OL arrive après Wolverhampton qui s’est déjà mis d’accord avec le joueur. João Gomes, qui rêve de Premier League, ne voudra jamais revenir sur la parole donnée aux Wolves malgré la présence de Bruno Cheyrou au Brésil et l’intervention de John Textor lui-même. Le Brésilien finira par obtenir gain de cause auprès de Flamengo qui le vendra finalement au club anglais pour un montant quasiment similaire à l’offre initiale de l’OL le 30 janvier soit 19 M€. Premier cuisant échec de l’OL, qui a perdu là de précieux jours dans sa quête de numéro 6.

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Entre temps, l’OL doit gérer les départs de joueurs dont celui non prévu de Karl Toko Ekambi, excédé par les critiques incessantes dont il fait l’objet de la part des supporters lyonnais. KTE débarque finalement à Rennes après là encore un long feuilleton et une certaine rancoeur vis-à-vis de Lyon. Et que dire de celui de Jeff Reine-Adélaïde, parti finalement à Troyes après un vrai-faux départ au Séville FC, et celui de Romain Faivre qui obtient finalement gain de cause en ralliant Lorient (au grand dam de ses agents), sa priorité depuis le début du mercato d’hiver.

Les éclaircies Malo Gusto et Rayan Cherki

Si l’OL réussit à faire partir ces trois joueurs, il échoue dans le dossier Thiago Mendes (pourtant récemment prolongé à la surprise générale), un joueur en difficulté sportive aussi bien au milieu de terrain qu’en défense centrale et que personne n’a vraiment voulu relancer au Brésil malgré de nombreuses tentatives lyonnaises durant le mois de janvier. Seule éclaircie dans le ciel noir lyonnais : les dossiers Malo Gusto et Rayan Cherki. Jean-Michel Aulas doit laisser filer le premier à Chelsea, mais parvient tout de même à le garder six mois supplémentaires (malgré une envie farouche de l’espoir lyonnais de rejoindre le club londonien dès cet hiver) tandis que le second reste à l’OL malgré une approche concrète du PSG pour ce dernier sans que l’on sache vraiment la somme qu’était prêt à mettre Paris pour le recruter. Mais si la fin de mercato approche, rien n’arrive à l’OL au grand dam des supporters lyonnais.

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28 janvier. Il ne reste plus que quelques heures pour l’OL pour tenter d’arracher de nouvelles recrues, d’autant que seul Dejan Lovren est arrivé. Après de nombreuses fausses pistes, l’OL boucle deux transferts. Amin Sarr (Heerenveen) est choisi et débarque à l’OL contre un chèque de 12 M€. Un attaquant prometteur d’Eredivise mais sans grande référence au plus haut niveau. John Textor fait jouer son réseau et fait sortir le prometteur ailier Jeffinho de son club de Botafogo contre là encore un joli chèque de 10 M€. Une belle promesse, mais aucune garantie du plus haut niveau. Wilson Isidor est lui aussi annoncé. Mais le joueur, qui ne voulait entendre parler que de Lorient, échoue à la visite médicale et se retrouve contraint et forcé de rester au Lokomotiv Moscou. Des joueurs prometteurs mais tendres débarquent donc au Groupama OL Training Center, tout le contraire de ce que souhaitait Laurent Blanc en ce début de mercato, souvenez-vous…

La quête impossible du fameux numéro 6

Et la quête du fameux milieu de terrain athlétique réclamé par Laurent Blanc fin décembre ? Ellyes Skhiri, le solide milieu tunisien est annoncé. Mais le joueur en fin de contrat en juin 2023 et qui est en pleine bourre à Cologne, ne veut pas venir malgré une approche concrète de Laurent Blanc qui l’avait érigé en priorité. À part ça ? Beaucoup de pistes creusées sans lendemain, de joueurs proposés et retoqués immédiatement par Bruno Cheyrou (Bentaleb, Laidouni, etc…). À noter tout de même un vif intérêt pour Adam Zorgane, le milieu de Charleroi, une approche encore une fois tardive et repoussée par le club belge qui n’entendait pas céder l’un de ses meilleurs joueurs en pleine saison. Mardi 31 janvier, la journée s’annonce donc décisive pour Bruno Cheyrou, victime depuis plusieurs jours d’une véritable cabale à son encontre sur les réseaux sociaux.

L’OL est en mode "panic buy" et multiplie les tentatives de dernière minute. Cheyrou tente en vain Fernando, le milieu brésilien de 35 ans passé par Manchester City. L’homme fort du mercato lyonnais tente une approche aussi surprenante qu’incompréhensible pour Tiémoué Bakayoko (en manque de temps de jeu et en cruel déficit physique) alors même que les agents du joueur ne sont pas au courant de l’intérêt lyonnais. Sans solution, l’OL se tourne vers une ancienne cible hivernale, Pathé Ciss déjà approché le 10 janvier comme nous le révélions. L’international sénégalais est séduit par l’approche lyonnaise, l’OL qui, rappelons-le, est prêt à mettre 6 M€ pour l’accueillir. Mais la manière de procéder des Lyonnais ne plaît pas vraiment au Rayo Vallecano qui n’a pas le temps de se retourner pour lui trouver un remplaçant. Résultat : un stop définitif à l’OL en fin de soirée. Résultat, Lyon se retrouve sans solution et va donc terminer la saison sans numéro 6 de métier alors qu’il s’agissait d’une priorité pour Laurent Blanc…

Quel avenir pour Bruno Cheyrou?

On le voit, rien ne s’est passé comme prévu pour l’OL qui disposait pourtant de moyens conséquents pour recruter et qui a vu des clubs comme Lorient réaliser un bien meilleur mercato. La punchline de Bruno Cheyrou de juillet 2022 a décidément bien mal vieilli. Si Jean-Michel Aulas promet une grande carrière de directeur sportif à Cheyrou et qu’il espère même le voir longtemps à ce poste à l’OL comme il l’a indiqué dimanche dans une interview accordée au Monde avec une sacrée science du timing, rien n’indique qu’il en aura le temps. Comme évoqué précédemment, les supporters de l’OL sont exaspérés par la direction prise par leur club de coeur et la manière dont il est géré sportivement depuis plusieurs mois. Selon nos informations, Bruno Cheyrou est donc clairement visé et est désigné coupable des errances sportives lyonnaises comme Vincent Ponsot d’ailleurs et dans une moindre mesure Jean-Michel Aulas.

On pourrait ainsi assister à un profond remaniement à ce poste-là dans les prochains mois. John Textor, dont certains supporters ironisent sur le fait qu’il s’est montré plus actif que Bruno Cheyrou sur le mercato de l’OL, pourrait bien mettre un sacré coup de pied dans la fourmilière. Car au-delà de la gestion chaotique du mercato de l’Olympique Lyonnais, la question de la place de certains jeunes talents "made in OL" va forcément se poser. Le talentueux Mohamed El Arouch n’en peut plus de ne pas avoir sa chance en équipe première et était prêt à claquer la porte cet hiver, lui qui était notamment pisté par l’OM, ironie du sort. Quid aussi de Bradley Barcola, qui est l’une des rares satisfactions de ce début d’année 2023 à l’OL et qui va voir arriver de la concurrence sur les ailes ?

Enfin dernier point, et non des moindres, l’immense chantier qui attend l’OL l’été prochain avec les fins de contrat de Moussa Dembelé, de Houssem Aouar, le départ de Malo Gusto (qui n’est que prêté par Chelsea) et la gestion du cas Castello Lukeba, promis aux plus grands clubs européens et que Lyon s’est déjà résigné à perdre. Malgré ce marasme ambiant, Laurent Blanc, pour le moment épargné par les critiques, va devoir redresser une équipe sans leader, sans profondeur de banc et donc avec des recrues qu’il n’a pas eues pour tenter de finir à la meilleure place possible. Quand on est l’OL, l’un des clubs les plus titrés et les mieux structurés de France, ce n’est pas anodin.

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